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Portrait de leader

L'observateur du mouvement humain

Georges-B. Lemieux
Georges-B. Lemieux
Photo : Michel caron

5 février 2009

Josée Beaudoin

Étudiant, athlète, entraîneur, vice-doyen à l'enseignement, doyen, responsable de programme, directeur, professeur… Au cours des 40 dernières années, Georges-B. Lemieux a porté tous ces chapeaux à l'Université. Il ne manquait qu'un seul titre au tableau, soit celui de professeur retraité, et il a remédié à la situation le 1er janvier.

Avec des si…

Vous considérez-vous comme un leader? Un simple «oui» aurait pu clore la question, mais Georges-B. Lemieux a le souci du mot juste, la pensée bien structurée et l'humilité exemplaire.

«J'ai envie de répondre à cette question de façon hypothétique, dit-il. Si être un leader, c'est être capable de contribuer à l'avancement des personnes, des projets et d'une institution, alors j'aurais envie de vous dire oui, mais avec beaucoup, beaucoup d'humilité. Si être un leader, c'est avoir certaines qualités personnelles, je dirais que j'en suis possiblement un. Si être un leader, c'est être capable de travailler fort, sans compter le nombre d'heures, j'aurais envie de dire oui. Si le leader est quelqu'un qui a envie de se développer lui-même, j'aurais envie de dire oui aussi. C'est là une première partie de l'équation, mais selon moi, on ne naît pas leader. On le devient seulement si les gens, dans leur perception, nous reconnaissent un certain leadership.»

Dire que ses collègues ont reconnu chez lui un certain leadership ne serait pas tout à fait exact. Pour dire juste, il faudrait y aller d'une inversion et parler plutôt d'un leadership certain, comme en témoigne Carlo Spallanzani, vice-doyen à la Faculté d'éducation physique et sportive : «Pour décrire Georges, j'irais en trois temps. Dans un premier temps, je dirais qu'il s'est dédié comme pas un à son institution, et principalement à sa faculté, avec un sentiment d'appartenance hors du commun. Dans un deuxième temps, il a toujours été très soucieux de la qualité des programmes offerts aux étudiants, tant au 1er qu'au 2e cycle. Jusqu'à tout récemment, il était encore responsable du baccalauréat en enseignement et, même à sa retraite, il participe à l'évaluation du baccalauréat en kinésiologie. C'est tout dire. Dans un troisième temps, ce qui le caractérise, c'est le grand respect qu'il a toujours porté à chacun des membres du personnel de la Faculté et à chacun des étudiants.»

Dans son bureau qu'il a vidé tout dernièrement, retraite oblige, Georges-B. Lemieux n'a jamais accroché officiellement les diplômes attestant de son baccalauréat et de sa maîtrise en éducation physique, ni de son baccalauréat et de son doctorat en psychologie. Tout au long de sa carrière, il ne s'est jamais valorisé par ses titres ni assis sur ses lauriers; il a travaillé fort, fasciné par la compréhension de l'être humain et l'observation du mouvement. «Pour moi, le mouvement humain, c'est la fin du monde! s'exclame-t-il. C'est tellement beau! Je trouve merveilleux de voir Tiger Woods frapper la balle.»

L'observation du mouvement humain, Georges-B. Lemieux l'a placée au coeur de ses recherches et, même si son épouse le taquine en disant qu'il n'a rien trouvé, les conclusions de l'équipe de recherche et d'intervention ont permis la mise sur pied d'un cours novateur mettant en relation l'aspect moteur, l'aspect cognitif et l'aspect biomécanique du mouvement humain en vue d'une meilleure intervention pédagogique.

Le maximum de chacun

Comme athlète et comme entraîneur, Georges-B. Lemieux a goûté à la compétition et vibré à la victoire. Toutefois, la performance a pour lui plus d'un visage. En 1995, il initiait le programme d'activité physique Touratelier, destiné aux adultes ayant une déficience intellectuelle de moyenne à profonde. Alors que tous voient en lui l'instigateur du programme, lui se voit plutôt comme l'humble serviteur qui a répondu aux souhaits des parents de la clientèle concernée.

Toujours active, l'initiative est le fruit d'un partenariat entre la Faculté d'éducation physique et sportive, le Centre Notre-Dame de l'Enfant et un regroupement de parents. Même si Georges-B. Lemieux précise qu'il n'intervient pas sur le terrain, l'évolution de Touratelier compte parmi les mandats qui lui sont chers et qui viendront animer sa retraite. Il collabore également à un autre projet dont le but est d'aider les personnes ayant une déficience intellectuelle à développer leur autonomie pour aller s'entraîner seules dans les centres de conditionnement physique.

Laisser son empreinte

L'une des belles fiertés du pédagogue est celle d'avoir aidé quantité d'étudiants à se former en établissant avec eux une relation affective qui outrepasse la simple transmission de matière. «Il y a peut-être 3000 à 3500 personnes qui m'ont eu comme prof. Qu'est-ce qu'on leur laisse à ces personnes-là? Je n'ai pas fait le tour, mais j'ai le sentiment de leur avoir laissé quelque chose», dit Georges-B. Lemieux.

De plus, sa contribution à la création, au développement et à la révision des programmes de sa faculté est un riche héritage qu'il laisse aux futures générations, voire à sa profession. Toutefois, pour trouver son assentiment, cette dernière phrase devra être nuancée : «Que ce soit bien clair : je ne me considère pas comme un agent de développement de ma profession. J'y ai contribué, au même titre que mes collègues, et je suis fier que notre profession se soit autant développée au fil des années.»

Les finissants du baccalauréat en enseignement en éducation physique seront peut-être surpris de lire que Georges-B. Lemieux est maintenant retraité puisqu'ils le voient en cours chaque lundi matin. «Ce n'est pas un cours traditionnel, se défend-il en riant. C'est une activité pédagogique de deux crédits, que je donne en collaboration avec mon collègue Carlo Spallanzani, pour aider les finissants à s'intégrer dans le milieu du travail et de l'enseignement.» Et est-ce là votre dernière activité pédagogique, Professeur? «J'en ai aucune idée!» répond-il encore en riant.

En avant, marche!

Marcher 45 minutes aussi souvent que possible pour se rendre ou revenir du boulot, parfois les deux… Voilà ce qu'a fait notre leader au cours des 15 dernières années. Pour lui, c'était une question d'activité physique, de pur plaisir et de santé mentale. «Quand je traversais le pont Jacques-Cartier pour m'en aller à la maison le soir, j'essayais d'en déverser dans la rivière Magog, dit-il. Et quand je m'en venais au bureau le matin, j'essayais de voir ma journée et de m'y préparer. Je ne perdais pas 45 minutes, au contraire. La marche me permettait de réfléchir.»

Avec tous les projets qu'il a encore à l'Université, gageons qu'il coulera beaucoup d'eau sous le pont Jacques-Cartier avant que le nouveau retraité ne cesse de marcher vers cette faculté qu'il appelle toujours «chez nous».

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